NIRVAN’ART

NIRVAN’ART ou “le Nirvana dans l’Art”, en voilà un évènement conçu par des femmes artistes aux  différents parcours, différents talents, différentes disciplines pour célébrer la Journée Mondiale de la Femme.

Elles sont dix-neuf bouts de femmes, entre 20 et 35 ans, réunies pour cet après-midi exceptionnel, “puisque là où ont réussi les hommes, nous pouvons très bien y arriver aussi”, affirment-elles. Elles nous donnent rendez-vous dans l’après-midi du 8 mars prochain (à partir de 14h30) dans la salle “Kianja” de l’ IKM à Antsahavola, avec une Participation Aux Frais de Ar 5000 - Spectacle + Captation DVD.

 

Mais pour mieux vous préparer au grand jour, RadioVazoGasy vous livre en exclusivité leur ressenti, tout en remerciant chacune des participantes qui ont encore trouvé le temps de répondre à ces quelques questions que nous leur avons posées, à savoir : comment c’est être jeune, être femme et être Artiste à Madagascar ? Qui étaient vos mentors qui vous ont poussé/soutenu jusque-là ? Etait-ce facile d'imposer votre genre, votre style ? Vous sentez-vous arriver au point culminant de votre vie d’artiste maintenant ?

 

 

Krees Raharison, photographe SHE : 

"La photographie féminine apporte une touche toujours différente de celui des hommes, elle y reflète un caractère sensuel, fragile et délicat propre aux femmes, ainsi qu'un regard plus affiné aux détails.
Je pense que chaque jour est un apprentissage, surtout dans la maîtrise technique de son art, mais la photographie est avant tout une découverte, qui nous fait voyager et nous pousse toujours à aller au delà de ce que l'on voit et de partager cette vision aux autres."

 

Anjaratiana, photographe SHE :

“Les gens ont encore du mal à accepter la fibre artistique en nous, surtout quand on est encore jeune. On insiste souvent sur le fait que “ce n’est qu’une passion” ou “un passe-temps”, alors qu’on pourrait la pousser beaucoup plus loin.
Personnellement, jec ommence à peine à voir ce qu'est "la vie d'artiste" (lol), grâce notamment à “She” et ses expositions, mais également avec ce genre d'évènement où j'apprends à connaître et côtoyer d'autres artistes, où je peux me sentir moi-même une artiste. J'ai encore du chemin devant moi, mais j'ai hâte d'avancer dans ce sens!


Johary Ratefy, photograhe SHE :
"A un moment donné, la photographie était un domaine exclusivement masculin, compte tenu du fait que le métier de photographe est un métier assez physique (port de matériels avoisinant les 10 kilos ou plus, les déplacements, …). Mais aujourd’hui, cette image est révolue et même largement dépassée puisque maintenant la photographie vue par les femmes est devenue un genre à part entière, une signature que beaucoup recherche dans leurs supports.
Personnellement, c’est beaucoup les amis proches, la famille et des amis photographes découverts en chemin qui ont été des soutiens inconditionnels dans mon aventure de photographe. Je les remercie d’ailleurs d’y avoir cru. 
Je suis encore très loin de ce que je voudrais accomplir en tant qu’artiste. Au fur et à mesure des rencontres et des expériences, il y a des idées qui jaillissent, des envies. Je crois que mon voyage est juste sur le point de commencer.”


Nanou Rahajason,
photographe SHE :
“C'est tout un art que d’ être jeune, femme et artiste ! (sourire). Surtout que les gens ont encore un peu de mal à accepter que l'art soit un métier à part entière, un gagne-pain comme on dit. Quand on a commencé le collectif SHE, c'était l'idée principale : montrer à tous que la photographie n'est pas réservé uniquement aux hommes, sans oublier l'amitié qui nous lie, bien entendu.
Celui qui m'a inspiré à devenir photographe il y a quelques années, est quelqu'un de très bien reconnu maintenant. Puis sont venus quelques idoles étrangers, notamment David Olkarny.
Je pense que l'art est quelque chose qui s'apprend et qui se pratique à l'infini.Il n'y aura jamais de point culminant car on évolue toujours, suivant la tendance, l'ambiance, les influences, mais surtout l'inspiration.”

Hoby Ratsimbazafy, photographe SHE :

“Etre artiste est un statut comme un autre, mais être femme à la fois et porter ou véhiculer sa culture en tant que Malgache est un joli cadeau de la vie. Bien évidemment, comme toute chose, rien n’est facile. Il faut oser pour pouvoir imposer, un genre, un style, un talent quelconque, car on sait pertinemment qu’en Art, il n’y a pas de bon ou de mauvais, ce sont juste les goûts qui sont variés. Le travail d’artistes se nourrit du quotidien, des études, d’amour, d’amitié, de foi, de tout, en fait. L’artiste ne peut pas non plus être déconnecté des contraintes sociales, sociétales et financières, mais le plus dur dans ce domaine c’est de savoir faire la différence ou encore associer l’Art pour le commerce et l’Art pour soi-même. On ne peut pas avoir des idées tous les jours, je ne peux pas prendre en photo tout ce qui bouge.
Si on choisit cette activité, c’est aussi pour assumer de ne rien faire de temps en temps ; mais on ne vit pas d’amour et d’eau fraîche, dit-on, et dans un pays comme le nôtre surtout, on doit (beaucoup) produire pour vendre d’une manière ou d’une autre, tel est le dilemme.
Qui sont mes mentors ? Je ne me lasserai jamais de le répéter que grâce à eux : mes proches, ma famille, ma deuxième famille, mes amis, j’ai réussi à vivre de ma passion. Ces personnes qui m’ont toujours soutenu durant les crises de panique ou pendant les jours de folie ! Tout cela pour dire que l’Art, lui non plus n’a pas d’âge, et comme la vie, on en apprend un peu chaque jour. Donc je ne vais pas m’arrêter là, j’ai encore un long chemin à faire."

Julie Iarisoa, danseuse :

”Je ne me sens plus être parmi les plus jeunes mais être artiste femme malgache est un combat de tous les jours, la création chorégraphique est encore souvent incomprise à Madagascar , mais il suffit d'être bien claire dans l'objectif et l'utilité de cet art pour soi, ainsi que pour la société, et de ne pas se fatiguer à redoubler les efforts à chercher des moyens d'approches vers le public.
J'ai appris beaucoup de choses avec beaucoup d'artistes, même ceux qui sont en dehors du milieu chorégraphique. Parmi eux : Ariry Andriamoratsiresy (Compagnie Rary), Germaine Acogny (Directrice et chorégraphe Ecole des Sables Sénégal), Eric Mézino (Compagnie Ego France), Bernardo Montet (Compagnie Mawguerite France).
Je n'ai jamais senti être déjà arrivée au Top de ma carrière, j'apprends encore tous les jours, j'aime découvrir des nouvelles choses pour nourrir et développer mon art, et j'adore confronter mes idées aux autres idées totalement inverses."

Clipse Teean, writterz :
“Être Jeune, être femme et être artiste à Madagascar ne m'a jamais posé de problème sauf au niveau des matériels que j'utilise (manque de bombes et de cap de bonnes qualités).Et dans l'art que je fais, c'est à dire le Graffiti, les gens ont tendance à nous considérer comme des délinquants, des" vandals". Je réponds toujours que je suis une Vandale mais je ne vandalise pas n'importe comment  ; oui je ne suis pas magicienne pour changer les bétons armés en pailettes mais je change les vues pour redonner espoir, pour sensibiliser, partager ce que je ressens, pour faire passer des messages, pour dénoncer ce qui se passe, etc.
J'ai jamais eu de mentors, mais je suis bien entourée dans le monde du Hiphop où on m'a dit de ne jamais laisser tomber quoi que les gens en disent. Ma Passion pour mon Art m'a poussé à donner toujours les meilleurs de moi même, même si je suis la seule qui répresente la gent féminine du bled dans le Graffiti.
Du haut de mes 30 balais, je me sens pas être au point culminant de ma vie d'artiste. Tant que j'ai de l'inspiration,tant que je peux créer, tant que j'ai une chose à dire, tant que j'ai une souffle de vie, je continuerais mon Art, car chaque jour on apprend, expérimente, observe, enregistre et on déduit. "Jamais dans la tendance mais toujours dans la bonne direction" comme dirait bien la Scred Connexion “.

 

Fanny Lantoniaina Rasoamiaramanana, artiste plasticienne :
Être
jeune pour moi c’est être libre et responsable de son avenir, afin d’être un
acteur de changement pour la société malagasy. Être femme et artiste est un
grand défi mais très faisable, parce que vivre de sa passion est la meilleure
des choses. Comme on dit toujours, "les artistes sont des êtres qui ont gouté le
nectar de la vie
". J’ai été encadrée par Hemerson Randrianetrazafy et RFaral. Je
me considère comme une artiste féministe. Mon style, concernant surtout le
recyclage des produits, est accepté. A la fois fonctionnelles ou purement
décoratives, avec des qualités artistiques, mes œuvres sont chargées d’énergies
positives.
Pour moi,
l’Art, c’est autant de travail et de passion, de l’engagement d’une vie, d’un
défi permanent qui stimule mon inspiration ; et ce n’est que le début d’une
grande aventure. J’ai encore beaucoup à apprendre (sourire).

 

Sleeping Pop, bedeiste, body painter :
“D'abord être jeune à Madagascar c'est avoir pleins d’opportunités parce que l'on est encore plein d'imagination et d’énergies . On veut toujours tout faire et réaliser toutes les folies possibles jusqu'au jour où l'on va se dire "voilà, j'ai pas tout fait mais au moins j'ai déliré à fond !".  Etre femme à Mada, c'est être belle, parce qu'on est un carrefour de métissage pas possible ! Mais aussi être limitée, malgré le fait que de plus en plus de femmes sont indépendantes et viriles (langue tirée). Les préjugés, et la peur de la limite sont encore et encore présents. Ëtre artiste à Mada, un choix de vie super ! On peut se permettre de tout : habillement, coiffure, mode de vie, ... La créativité déborde de partout parce que tout est inspiration .
La faille est toujours à l'endroit où l'on peut se permettre d'être nous-même, les moyens ... parce que choisir d'être "ARTISTE" c'est aussi choisir de donner au maximum contre vents et marrées mais de ne pas espérer recevoir ; ou on peut recevoir mais au mininum parce que l'Artiste n'est pas encore reconnue en tant que métier à part entière,  juste un passe-temps . Or moi je vis personnellement de mes arts, donc imaginez ma vie ! (langue tirée)
La route de l'imposition est longue et difficile . Il faut un renom et une carrure, des moyens . Mais quand on commence à être soi-même conquis par ce que l'on est et ce que l'on veut faire ... ça pourrait aller.
Mes mentors ? Mes caractères : "Mafy loha", "Tsy mivaky lova", "Tsy maintsy hataoko ‘ty fa io no tiako hiainana !"
A mon âge et avec ce que j'ai accompli,  je ne pense pas que je suis au point culminant. Je peux faire mieux, je peux faire bien plus que ça ! Il me faut juste les moyens moraux, spirituels, et le courage. Surtout du courage !

Joey Aresoa, poétesse slameuse :
" Jeune, femme, artiste ? C’est la question combo ! Même pris un à un, ces trois adjectifs représentent un vrai parcours du combattant ! Mais à y regarder de plus près, je pense que la plupart du temps, c’est un sacré atout : tu te fais une place plus « aisément ».Quotas exige. Vous entendrez des « en plus elle est jeune » ou alors, "vous serez la seule femme de la pièce", donc le centre de la pièce !!! Même dans le monde professionnel, ça a toujours été un atout et le fait d’être qualifiée « femme artiste », ça ouvre des portes inopinée.
Mes mentors... la liste est longue : mes parents : interminables jeux de mots, Stef H2K pour l’essence du slam, David Jaomanoro pour l’amour d’écrire et de partager, Isaac, mentor permanent et source de renouveau.
Disons que ma vie d’artiste c’est une chaîne de quelques milles montagnes, et que le prochain culminant serait le fameux recueil de poèmes, j’y suis presque. Mais l’écriture est toujours perfectible, et allier l’écriture à d’autres créations est infinie."

Imiangaly, chanteuse :
“Je serai très bientôt à l'âge "où les femmes se sentent les plus belles…" et celui "où les gueules de bois durent 10h 24" parait-il… Être jeune, femme et artiste dans une société "originellement matriarcale", où l'on est appelée à cohabiter avec des gentlemen, des machos, des "BG", des mufles de tous âges, des "ouverts d'esprit", des conservateurs, des corrompus, des surdoués de l'Art, des paumés, des passionnés... est toute une expérience, un combat.
Je carbure à L'Amour, Mon Amoureux est ma force.
Le "point culminant de la vie d'un Artiste", ça existe ?”

Bambs, rappeuse :
Jeune, femme, artiste : c'est super, je suis fière de l'être. Fière de rester moi-même au fait, je fais ce que j'aime, je partage librement ma passion, certes les préjugés et a priori du public n'étaient pas forcément plaisants, car j'ajouterais un autre adjectif a la liste "rappeuse".
J'ai eu la chance d'avoir été Entourée, bien entourée d'ailleurs, de mes grands frères de la famille HipHop, de vrais grands frères qui m'ont encouragé a me focaliser dans la création. Bref... je dirais que c'est un atout d'être une jeune femme, qui fait du rap. C'est pas courant, ca intrigue les gens, ils veulent, au contraire, "vérifier" si on en est capable, et tant mieux car nos messages passent facilement. Oui, j'ai su imposer mon style, le rap. Le public me connait en tant que rappeuse, c'est déja beaucoup, non! (rire).
Comme mentors, disons qu'il y a mes grands frères du clan Diosezy qui m'ont integré dans ce milieu. Indirectement ils m'ont montré le processus de création, d'écriture. Au départ j'etais interprète ; quand j'ai commencé à écrire, j'hésitais un peu à faire écouter mes textes, mais petit à petit ca passait. J'avais carte blanche, j'avais la totale liberté de choisir mes mots, trouver mon flow, l'autoévaluation s'impose, et voila je suis au point ou j'en suis actuellement : auteure interprète.
Arrivé au point culminant ? euh ... je continue à apprendre, à écouter, à observer, et tirer des lecons de ce qui se fait ou ne se fait pas ; je poursuis mon p’tit bout de chemin, et j'encourage surtout la gent feminine à toujours créer et trouver sa signature, son authenticité au niveau des textes et des flows et à savoir s'imposer dans le choix des instrus ou au moment de la compo. Idem de mon coté, j"essaie autant que possible de me perfectionner. Ne pas oublier les valeurs du HIP HOP partout où l'on va : Peace, Love, Respect, Unity, Having fun."

Mahalia, guitariste :
"Être jeune , femme et artiste implique beaucoup d'énergie, de volonté et du courage. Étant jeune, je decouvre et j'apprend encore. La femme est douce, source d'amour et de vie. Étant artiste, le partage est important, car on partage notre art à ce qui veulent découvrir. Sans oublier l'importance de la culture car les jeunes, aujourd'hui, ont tendance à oublier que dans chaque art il y a une culture.
Il n'est pas facile d'imposer son style, beaucoup interprètent mal et posent immédiatement des étiquettes en se référant sur ce qu'ils ont déja vu avant : «yes, je suis rock» mais cela ne veut pas dire «je ne joue que du rock» ; Rock est un état d'esprit, et le monde est libre.
Quant à mes mentors, je remercie particulièrement mes parents qui m'ont fait faire un grand plongeon dans ce monde , et me soutiennent toujours, me poussent à mieux faire. Et sans oublier Voots Kongregation (clin d'œil).
J'ai beaucoup à apprendre encore, je cherche toujours à m'améliorer et découvrir même ce à quoi je ne m'attend pas. Qui ne rêve pas d'aller plus loin ? Tant que je pourrai, j'essayerai."

Julie Ratefy, pianiste de VOOTS KONGREGATION :
"Être jeune, être femme et être artiste à Madagascar est un défi permanent, la conjonction de trois états qui vous soumettent aux préjugés persistants d'une société qui vit mal sa maturation intellectuelle et sa mutation morale. C'est une lutte de tous les instants pour justifier sa place dans la communauté et ne serait-ce qu'exprimer ses aspirations et ses valeurs.
Viscéralement traditionaliste, voire passéiste, la société malagasy persiste encore à juger la jeunesse comme une tare, la nouveauté comme une erreur et la différence comme une excentricité. Faire valoir sa personnalité, ses idées, son "style" à Madagascar, c'est s'exposer à l'incompréhension, à la mise au ban et à la jalousie.
Les mentors sont souvent ceux qui vous connaissent intimement et qui, débarrassés du carcan de la pensée commune, voient en vous quelque chose qui puisse enrichir le plus grand nombre, parfois malgré lui. Pour moi ce sont les parents, famille, amis proches...
L'artiste, l'être humain qui estime être arrivé au point culminant de sa vie et de sa carrière n'a plus qu'à rejoindre sa tombe !
Je suis maintenant à l’âge où l’on est suffisamment jeune pour être folle et suffisamment âgée pour en avoir conscience !”

 

Tasha, bassiste

Être jeune, femme, artiste, c'est une fierté pour moi, étant donné qu'à Madagascar, une femme à la basse, c'est un peu rare et c'est un grand honneur pour moi d'en faire partie (langue tirée). Étant jeune, j'ai encore beaucoup de choses à apprendre et à découvrir.
Imposer son style n'est pas du tout facile, il faut être patient, avoir de l'audace et surtout, il faut faire très attention pour que l'on ne soit pas mal interpreté ou mal jugé. 
Comme mentors, je tiens à remercier mon Chéri qui m'a toujours soutenu, mes ami(es) et surtout "Voots Kongregation" qui m'a toujours aidé et m'a poussé à aller encore plus loin.